CA/22-0125
Ongegrond
Commission d'appel
Beroepscommissie
Andere beslissing directeur
Le 20 juin 2022, une grève nationale a frappé tout le pays.
L’intimé, incarcéré au sein de la prison d’Andenne, a été privé d’une douche, et d’un préau.
L’intimé conteste la privation de ses droits susmentionnés.
L’article 148 de la loi de principes indique qu’un détenu peut se plaindre auprès de la Commission des plaintes de toute décision prise à son égard par le directeur, ou au nom de celui-ci.
L’article 79 de la loi de principes garantit le droit, pour chacun des détenus, à la promenade quotidienne.
S’il est vrai que la loi de principes régit le statut juridique interne des détenus, il n’en demeure pas moins que d’autres textes légaux s’appliquent également, en complément à cette loi. En effet, la loi de principes détermine le champ d’application de la Commission des plaintes. Toutefois, elle n’indique pas que cette juridiction n’est limitée qu’aux dispositions de la loi de principes.
Par ailleurs, la loi du 23 mars 2019 concernant l'organisation des services pénitentiaires et le statut du personnel pénitentiaire prévoit, en son article 17 :
« Afin de garantir la sécurité et la santé des individus incarcérés, il doit être prévu pendant toute la durée de la grève, au minimum quotidiennement, que chaque détenu:
1° reçoit les repas correspondant en quantité et en qualité suffisante et conforme aux exigences de son état de santé; les repas dont au moins un repas chaud étant distribués à heure fixe;
2° est en mesure de soigner convenablement son apparence et son hygiène corporelle ainsi que de son espace de séjour; en cas de grève de plus de deux jours, le détenu a, dans une période d'une semaine, la possibilité de se doucher au moins deux fois;
3° reçoit les soins médicaux et de bien-être, y compris la continuité de ceux-ci, que son état de santé requiert
4° a la possibilité d'avoir accès à l'air libre pendant une heure au minimum; (…) ».
Selon l’article 16 de la circulaire ministérielle n°1819 du 24 février 2020, le directeur de la prison doit prendre les mesures nécessaires afin d’assurer le service conformément au plan visé à l’article 19 de la loi du 23 mars 2019.
La loi du 23 mars 2019, et la circulaire ministérielle ne font que complémenter l’article 79 de la loi de principes susmentionné, qui garantit le droit au détenu à la promenade quotidienne au détenu, dont la direction à la charge d’en assurer le respect.
Il ressort de la Lettre Collective (LC) n°107 du 16 juin 2011, précise que : « La promenade est commune. Le détenu ne peut être exclu de la participation à la promenade commune que dans le cadre d'une mesure de sécurité particulière, d'un régime de sécurité particulier individuel ou d'une sanction disciplinaire. En pareils cas, le détenu conserve néanmoins toujours le droit à un séjour (individuel) en plein air d'au moins une heure par jour. La promenade individuelle doit avoir lieu à une heure raisonnable » (p. 22).
Le principe du droit du détenu de s’aérer a été réaffirmé à plusieurs reprises aux Pays-Bas, par le Raad voor Strafrechtstoepassing en Jeugdbescherming.
Contrairement aux dires de l’appelant, le droit de plainte belge se base sur le modèle néerlandais . La Cour Constitutionnelle a, en effet, confirmé que :
« Il apparaît ainsi, en ce qui concerne la procédure pénitentiaire spécifique, qu’il a été choisi de se baser sur un modèle qui instaure, en droit néerlandais, un recours juridictionnel en confiant la procédure des plaintes à des organes juridictionnels ».
L’intention du législateur belge était de donner une portée similaire à son champ d’application (voir travaux préparatoires de la loi de principes ) :
« En fait, la réglementation belge est tout à fait parallèle à celle des Pays-Bas : il n’existe pas de points fondamentaux de divergence, si ce n’est la plus grande indépendance accordée à la Commission des plaintes dans la réglementation proposée en Belgique. Dans la plupart des cas, il est en outre tenu compte des réajustements apportés à la réglementation néerlandaise initiale de 1977 sous l’influence de l’expérience pratique ».
Outre la Lettre Collective n°107 et la jurisprudence hollandaise, la Cour européenne des droits de l’homme accorde un poids particulier à la possibilité de faire de l’exercice en plein air, à la durée de ces activités et aux conditions dans lesquelles les détenus peuvent les pratiquer. Elle se réfère aux normes pertinentes du CPT (Comité européen pour la prévention de la torture), selon lesquelles tous les détenus, sans exception, doivent bénéficier d’au moins une heure d’exercice en plein air chaque jour.
Les trois conditions subordonnant (décision individuelle, prise par le directeur, au regard d’un droit garanti par le statut interne) la compétence de la Commission des plaintes étant remplies, c’est à bon droit que celle-ci s’est déclarée compétente pour connaître de la plainte introduite par l’intimé.
Pour garantir ce droit à la promenade quotidienne, le directeur doit prendre les mesures nécessaires afin d’assurer le service conformément au plan visé à l’article 19 de la même loi.
Une atteinte à ce droit ne peut se justifier que par un cas de force majeure, à savoir un événement soudain, imprévisible et incertain, pour lequel la direction se trouve dans l’impossibilité d’y remédier. Cet événement ne doit pas avoir été voulu par elle, ni causé par elle, même indirectement.
Dans le cas d’espèce, la grève du 20 juin était annoncée depuis plusieurs jours de sorte que la direction avait la possibilité de prendre les dispositions pour organiser le service minimum tel que requis par les normes légales et réglementaires citées plus haut. Cette grève ne constituait donc pas un événement imprévisible et incertain.
Enfin, la direction invoque que, parmi les membres du personnel, des malades inopinés se sont déclarés le matin même, ce qui a rendu impossible le fait de maintenir le préau et les douches. Toutefois, la direction n’a pas été en mesure d’objectiver ces absences et ne fournit aucun chiffre à cet égard. La direction n’établit dès lors pas la force majeure concernant ces malades inopinés ; elle ne fournit aucune donnée chiffrée permettant de justifier sa position (nombre de grévistes ; nombre de malades inopinés, nombre de détenus ayant pu accéder aux ateliers, etc.).
Au vu des éléments susmentionnés, la plainte de l’intimé est recevable, et fondée.
L’intimé, incarcéré au sein de la prison d’Andenne, a été privé d’une douche, et d’un préau.
L’intimé conteste la privation de ses droits susmentionnés.
L’article 148 de la loi de principes indique qu’un détenu peut se plaindre auprès de la Commission des plaintes de toute décision prise à son égard par le directeur, ou au nom de celui-ci.
L’article 79 de la loi de principes garantit le droit, pour chacun des détenus, à la promenade quotidienne.
S’il est vrai que la loi de principes régit le statut juridique interne des détenus, il n’en demeure pas moins que d’autres textes légaux s’appliquent également, en complément à cette loi. En effet, la loi de principes détermine le champ d’application de la Commission des plaintes. Toutefois, elle n’indique pas que cette juridiction n’est limitée qu’aux dispositions de la loi de principes.
Par ailleurs, la loi du 23 mars 2019 concernant l'organisation des services pénitentiaires et le statut du personnel pénitentiaire prévoit, en son article 17 :
« Afin de garantir la sécurité et la santé des individus incarcérés, il doit être prévu pendant toute la durée de la grève, au minimum quotidiennement, que chaque détenu:
1° reçoit les repas correspondant en quantité et en qualité suffisante et conforme aux exigences de son état de santé; les repas dont au moins un repas chaud étant distribués à heure fixe;
2° est en mesure de soigner convenablement son apparence et son hygiène corporelle ainsi que de son espace de séjour; en cas de grève de plus de deux jours, le détenu a, dans une période d'une semaine, la possibilité de se doucher au moins deux fois;
3° reçoit les soins médicaux et de bien-être, y compris la continuité de ceux-ci, que son état de santé requiert
4° a la possibilité d'avoir accès à l'air libre pendant une heure au minimum; (…) ».
Selon l’article 16 de la circulaire ministérielle n°1819 du 24 février 2020, le directeur de la prison doit prendre les mesures nécessaires afin d’assurer le service conformément au plan visé à l’article 19 de la loi du 23 mars 2019.
La loi du 23 mars 2019, et la circulaire ministérielle ne font que complémenter l’article 79 de la loi de principes susmentionné, qui garantit le droit au détenu à la promenade quotidienne au détenu, dont la direction à la charge d’en assurer le respect.
Il ressort de la Lettre Collective (LC) n°107 du 16 juin 2011, précise que : « La promenade est commune. Le détenu ne peut être exclu de la participation à la promenade commune que dans le cadre d'une mesure de sécurité particulière, d'un régime de sécurité particulier individuel ou d'une sanction disciplinaire. En pareils cas, le détenu conserve néanmoins toujours le droit à un séjour (individuel) en plein air d'au moins une heure par jour. La promenade individuelle doit avoir lieu à une heure raisonnable » (p. 22).
Le principe du droit du détenu de s’aérer a été réaffirmé à plusieurs reprises aux Pays-Bas, par le Raad voor Strafrechtstoepassing en Jeugdbescherming.
Contrairement aux dires de l’appelant, le droit de plainte belge se base sur le modèle néerlandais . La Cour Constitutionnelle a, en effet, confirmé que :
« Il apparaît ainsi, en ce qui concerne la procédure pénitentiaire spécifique, qu’il a été choisi de se baser sur un modèle qui instaure, en droit néerlandais, un recours juridictionnel en confiant la procédure des plaintes à des organes juridictionnels ».
L’intention du législateur belge était de donner une portée similaire à son champ d’application (voir travaux préparatoires de la loi de principes ) :
« En fait, la réglementation belge est tout à fait parallèle à celle des Pays-Bas : il n’existe pas de points fondamentaux de divergence, si ce n’est la plus grande indépendance accordée à la Commission des plaintes dans la réglementation proposée en Belgique. Dans la plupart des cas, il est en outre tenu compte des réajustements apportés à la réglementation néerlandaise initiale de 1977 sous l’influence de l’expérience pratique ».
Outre la Lettre Collective n°107 et la jurisprudence hollandaise, la Cour européenne des droits de l’homme accorde un poids particulier à la possibilité de faire de l’exercice en plein air, à la durée de ces activités et aux conditions dans lesquelles les détenus peuvent les pratiquer. Elle se réfère aux normes pertinentes du CPT (Comité européen pour la prévention de la torture), selon lesquelles tous les détenus, sans exception, doivent bénéficier d’au moins une heure d’exercice en plein air chaque jour.
Les trois conditions subordonnant (décision individuelle, prise par le directeur, au regard d’un droit garanti par le statut interne) la compétence de la Commission des plaintes étant remplies, c’est à bon droit que celle-ci s’est déclarée compétente pour connaître de la plainte introduite par l’intimé.
Pour garantir ce droit à la promenade quotidienne, le directeur doit prendre les mesures nécessaires afin d’assurer le service conformément au plan visé à l’article 19 de la même loi.
Une atteinte à ce droit ne peut se justifier que par un cas de force majeure, à savoir un événement soudain, imprévisible et incertain, pour lequel la direction se trouve dans l’impossibilité d’y remédier. Cet événement ne doit pas avoir été voulu par elle, ni causé par elle, même indirectement.
Dans le cas d’espèce, la grève du 20 juin était annoncée depuis plusieurs jours de sorte que la direction avait la possibilité de prendre les dispositions pour organiser le service minimum tel que requis par les normes légales et réglementaires citées plus haut. Cette grève ne constituait donc pas un événement imprévisible et incertain.
Enfin, la direction invoque que, parmi les membres du personnel, des malades inopinés se sont déclarés le matin même, ce qui a rendu impossible le fait de maintenir le préau et les douches. Toutefois, la direction n’a pas été en mesure d’objectiver ces absences et ne fournit aucun chiffre à cet égard. La direction n’établit dès lors pas la force majeure concernant ces malades inopinés ; elle ne fournit aucune donnée chiffrée permettant de justifier sa position (nombre de grévistes ; nombre de malades inopinés, nombre de détenus ayant pu accéder aux ateliers, etc.).
Au vu des éléments susmentionnés, la plainte de l’intimé est recevable, et fondée.