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CP36/24-0142

Gegrond CP - Haren Klachtencommissie Ordemaatregel
MESURE D'ORDRE - TRAVAIL - DROIT D'ETRE ENTENDU

La Commission rappelle que le droit pour le détenu de travailler est un droit subjectif reconnu par l’article 87 de la loi de principes : « Le détenu a le droit de participer au travail disponible dans la prison ».
Une mesure de retrait ou de changement d’emploi est une mesure d’ordre régie par l’article 105 de la loi de principes.
Une telle mesure d’ordre doit :
- Se fonder sur des faits avérés ;
- Être valablement motivée ;
- Être proportionnée par sa nature et sa durée .
- Être motivée formellement au sens des articles 2 et 3 de la loi du 29 juillet 1991 et adéquatement.

En l’espèce, la mesure d’ordre attaquée se fonde sur :
- Le fait que la plaignante ait tenu des propos racistes envers d’autres détenues ;
- La rupture de confiance qui en découle.

La plaignante conteste les faits. Elle soutient avoir elle-même fait l’objet de propos antisémites de la part de ces détenues.
Néanmoins, elle reconnait les avoir traitées de voleuses.

En l’espèce, la Commission de plaintes relève les éléments suivants :
- La plaignante n’a reçu aucune forme d’avertissement et s’est vu directement retirer son emploi alors qu’elle venait de commencer le jour même ;
- La direction n’a pas tenu compte du fait que la plaignante avait déjà dénoncé une situation de conflit et notamment une agression de la part des autres détenues concernées.
- La plaignante n’a pas été entendue avant que la décision de retrait ait été prise

La Commission des plaintes relève que la décision de retrait n’explique pas en quoi les faits posent problème dans le cadre de l’exécution du contrat de travail de la plaignante.
A cet égard, la perte de confiance doit être dûment démontrée, fondée sur des faits en lien avec le travail, et ne peut se déduire d’une seule infraction disciplinaire. Dans un tel cas, la mesure d’ordre s’apparente à une double sanction .

En outre, la direction se fonde sur un rapport au directeur sans entendre le point de vue de la plaignante à ce sujet.
Or, selon le principe de bonne administration, la direction doit prendre une décision de retrait de travail qui porte atteinte au droit pour la plaignante de travailler en prison, en ayant égard à l’ensemble des éléments de faits dont découle sa décision.
Dans ce cadre, la direction, aurait dû entendre préalablement la plaignante, car cette audition aurait pu avoir une incidence sur la décision, ou la motivation de celle-ci.

En adoptant une décision qui porte atteinte à un droit subjectif de la plaignante sans s’entourer de tous les renseignements utiles à l’adoption de la décision, la direction méconnait les principes de motivation adéquate et de gestion consciencieuse. a
Si, comme l’a décidé la Commission d’appel, le principe de l’audition préalable de la personne concernée n’est pas imposée par la loi de principes, cette audition préalable doit néanmoins avoir lieu, dès l’instant ou l’audition du plaignant peut avoir une incidence sur la décision à adopter.
Ainsi, le Conseil d’Etat a jugé que le principe audi alteram partem « impose que, lorsque l’autorité administrative envisage l’adoption d’une mesure grave – de caractère non disciplinaire – prise en raison du comportement de l’administré, voire même de toute mesure grave indépendamment de son comportement, ce dernier doit, avant que ne soit prise la décision, sauf cas d’urgence, pouvoir être entendu ou du moins être mis en mesure d’exposer utilement son point de vue » .
En l’espèce, aucun élément d’urgence n’est invoqué dans la décision pour justifier l’adoption de la décision sans respecter ce principe.
Le retrait de travail est une atteinte grave au droit de la plaignante de pouvoir travailler en prison. Cette décision se fonde sur le comportement de la plaignante accusée de tenir des propos racistes. Si certes, l’exercice du travail en prison n’est pas régi par la législation sur le contrat de travail, une mesure de retrait en raison d’une faute grave commise par le travailleur, ne peut être adoptée qu’après avoir entendu le travailleur pour s’assurer que la décision repose sur l’ensemble des circonstances de fait qui ont conduit le directeur à adopter sa décision.
La Commission des plaintes estime en conséquence que la décision de retrait d’emploi n’est pas motivée adéquatement au regard du principe du droit d’être entendu préalablement et du principe de minutie et de précaution et que la décision de retrait de travail doit donc être annulée.

Pour l’ensemble des raisons qui précèdent, la plainte est fondée.
La Commission des plaintes fait droit à la demande de compensation de la plaignante et lui octroie 120 minutes de crédit téléphonique supplémentaires.